mercredi 1 octobre 2008

Un simple regard.

C'est chiant Arte. Entre les documentaires prise-de-tête et tarabiscotés et les films d'auteur ultra "space", il est très rare que cette chaîne ait droit de comparaître dans ma boîte à images.

Pourtant, lundi soir, aiguilloné par plusieurs amis, je me suis vautré dans mon canap' et j'ai zappé, du bout des doigts, jusqu'à parvenir à la chaîne numéro 7 de Numéricable, celle qui d'ordinaire ne m'est utile que pour passer du canal 6 au canal 8.
Bien m'en a pris.

Arte diffusait en effet le film allemand La vie des autres, tourné en 2006 et mondialement primé en 2007 et 2008 (meilleur film étranger aux Césars 2008 notamment). Et, brisant mes réticences primaires et ma bête inquiétude ("Merde, je vieillis! V'là t'y pas que je regarde Arte maintenant!"), ce long-métrage de Florian Henckel von Donnersmarck m'a complètement pris pour ne me lâcher qu'au bout de 2h15 de vrai grand cinéma.
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Le film a connu un certains succès, même en France. Aussi, je ne m'attarde pas sur l'histoire (un agent de la Stasi froid et inflexible surveille un couple d'artistes est-allemands, cinq ans avant la chute du mur et en vient finalement à les protéger de sa hiérarchie) qui vous est sans doute connue. En fait, je n'écris cet article que pour souligner la formidable partition jouée par Ulrich Mühe qui incarne merveilleusement cet agent du régime est-allemand qui voit peu à peu toutes ses certitudes s'effondrer pour finir par couvrir le couple qu'il est sensé compromettre.
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Malheureusement, Ulrich Mühe est décédé en juillet 2007 et n'a donc pas eu l'occasion de profiter du succès et de la reconnaissance qui lui a été légitimement acquise suite à sa remarquable performance. Mais, c'est surtout pour nous, simples spectateurs, qu'il est malheureux qu'un tel acteur, relativement neuf, ait disparu. Car vraiment, ce type, c'était un tout bon.
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En fait, ce qui m'a tout particulièrement marqué, c'est le regard de cet anti-héros. A mon sens, c'est ce regard qui fait tout le sel de la prestation de Mühe dans ce film. Il a été capable de se servir de ses yeux clairs pour retranscrire toute une palette d'émotions pourtant tout à fait opposées. De la froide détermination du début du film, en passant par la colère, la tristesse, la fragilité et l'émotion finale, tout passe par ce formidable regard, expressif comme rarement j'en ai vu au cinéma.
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Quiconque a fait un peu de théâtre sait combien il est dur d'obtenir le regard adéquat aux différents types de sensiblités joués, d'autant qu'on a coutume de dire que les yeux ne mentent pas. Et pour moi qui accorde une importance toute particulière aux regards des personnes que je rencontre, le jeu d'acteur d'Ulrich Mühe confine au génie. Bravo, à titre posthume.
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Nico.